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Visualiser demande et production

Comment communiquer efficacement les prochaines commandes et l’avancée de la production à son équipe?
Nous allons voir que les représentations les plus courantes ne sont pas les mieux adaptées, et qu’un ensemble de graphiques simples répond parfaitement aux besoins.

On va représenter les commandes, l’avancée actuelle de la production, ainsi que l’avancée prévue. À terme on pourra même visualiser la capacité restante, permettant ainsi de facilement évaluer si des livraisons supplémentaires sont possibles.

Les représentations peu adaptées

Par défaut, on va se tourner vers deux solutions très communes. Elles sont faciles et bien connues: la liste et le graphique d’avancement (burndown chart).

La liste

Une liste de commandes.
Une liste des échéances, quantités à livrer et quantités réalisées.

Facile, on la crée à la main ou on copie les informations du logiciel de gestion. Un coup de tableur, et le tour est joué: on a une liste avec les dates et les quantités à produire.

Une liste est très précise, mais elle a un désavantage majeur : pour comprendre la situation il faut d’abord en créer un modèle dans sa tête. Les dates et quantités sont présentées individuellement, ce qui rend leur interprétation complexe. Les membres de l’équipe vont souvent se retrouver à calculer le temps restant, puis estimer où ils en sont.

Le graphique d’avancement

Aussi appelé burndown chart en anglais, il s’est popularisé avec les méthodes de développement logiciel de type Agile. Il montre la quantité de travail restante pour accomplir l’objectif et a un aspect motivant, car on voit bien la diminution progressive du travail. On réduit petit à petit la quantité en se rapprochant toujours plus de la fin; il n’y a pas de sommet à gravir. Mais alors, pourquoi cette représentation n’est-elle pas adaptée?

Adapté au contexte Agile

Dans la méthode Agile, la quantité de travail requise, la durée du sprint et les ressources disponibles sont prédéterminées pour chaque période. Sauf incident majeur, on ne modifie pas ces paramètres. C’est seulement lors de la prochaine itération de planification que des ajustements seront éventuellement opérés. En conséquence, l’horizon est fixé et le graphique se termine à la fin de la période en cours.

Graphique d'avancement dans le contexte Agile.
Un graphique d’avancement pour une semaine. La ligne avance plus vite que prévu le lundi, puis subit un fort retard le mardi. Durant le mercredi elle rattrape une bonne partie de son retard et commence le jeudi avec une dizaine de pièces en moins que prévu.

Perte de sens dans la production


Cette représentation est très bonne tant que les quantités restent prédéfinies. Toutefois, cette situation est rare dans la production de biens physiques : les commandes des clients vont évoluer, les dates et quantités changer, on dépend de machines et de leur disponibilité, etc… Il n’y a pas de ‘fin’ établie. L’horizon se déplace avec le temps qui passe, les commandes qui entrent et les nouvelles prévisions.

Comment représenter les commandes futures sur un graphique d’avancement? La quantité à produire est la somme des commandes. Si on connaît les commandes à venir sur un horizon lointain, alors la quantité restante devient énorme et l’avancée quotidienne perd de son sens. On peut réduire l’horizon et ne prendre en compte qu’une partie des informations disponibles, mais alors quelle durée a réellement du sens?

Imaginons maintenant qu’une nouvelle commande arrive avec une échéance proche. On peut décider de ne rien changer au graphique et d’attendre la prochaine itération pour informer l’équipe de la nouvelle quantité.
Ou alors on communique immédiatement l’information, mais on doit alors augmenter la quantité à produire restante sur le graphique. La ligne semble tout d’un coup en retard. En lisant le graphique, la situation est ambiguë: la ligne réussira-t-elle à livrer les commandes à temps? L’objectif à atteindre, et sa définition, ne sont pas clairs. Or le manque de clarté et l’ambiguïté sont à éviter autant que possible.

Graphique d'avancement modifié suite à une nouvelle commande.
Le même graphique d’avancement, mais avec une nouvelle commande annoncée le mercredi.

Une visualisation adaptée

Nous allons voir une représentation alternative, qui permettra en un coup d’œil comprendre la demande, l’avancée de la production et sa vitesse. L’astuce est de séparer l’information en 3 graphiques distincts.
Dans cet exemple on a choisi une journée comme unité temporelle. Selon l’industrie et les besoins, on pourra choisir une base de temps différente.

La vitesse

Ce graphique est utile au responsable de la ligne. Il montre la production quotidienne prévue, ainsi que ce qui a réellement été réalisé.

Visualisation de l'avance quotidienne.
La vitesse de la ligne. Aux jours 11 à 15 une capacité moindre est anticipée. On voit des difficultés aux jours 4, 5 et 6. Puis la ligne tente de rattraper son retard en produisant plus que prévu les jours suivants.

La prévision doit être fiable et concerne le nombre de pièces terminées. Il ne faut donc pas représenter la vitesse idéale que l’on désirerait avoir, mais bien la vitesse réelle. On prendra en compte autant de facteurs prévisibles que possible: le taux de non-conformité, les délais usuels pour les retouches, les absences du personnel, etc…
Ainsi, on obtient une prévision du nombre de pièces produites pour chaque intervalle de temps.

On va ajouter sur cette prévision le nombre de pièces effectivement produites. Cela donne une impression visuelle des imprévus survenus et de leur impact sur l’avancée de la production.

Ainsi, côté prévision on verra par exemple une capacité réduite parce que certains membres de l’équipe sont en vacances. Une production inférieure à la prévision témoignera de difficultés sur la ligne, par exemple un problème de qualité ou une panne.

La demande

Dès qu’elle est connue, la demande peut être représentée au cours du temps par des barres verticales. On obtient immédiatement un aperçu de l’importance et de la distribution des commandes au cours du temps. La hauteur de cette barre, c’est exactement ce qu’il faudra avoir en stock pour pouvoir livrer à la date de la commande.

Visualisation de la demande.

Toutefois cette information seule n’est pas très utile. Elle va nous servir comme base d’une visualisation plus complète en y superposant la production.

La production

C’est le graphique le plus important. Il montre en un coup d’œil à l’équipe de la ligne quelles sont les commandes à remplir et où on en est pour le moment. L’important, c’est que la ligne de prévision ne soit jamais en dessous des barres des commandes. Cela voudrait dire qu’on n’arrivera pas à produire suffisamment pour satisfaire la livraison.

Visualisation de la production et de la demande.

Pour former ce graphique, on va combiner les deux informations précédentes. On avait d’une part la demande connue, et d’autre part la vitesse de production. La vitesse de production permet de calculer le stock disponible. Quand la ligne livre une commande, la quantité disponible diminue d’autant.

La prévision

Finalement, on peut encore afficher pour chaque jour à venir le stock restant qui serait disponible pour une commande supplémentaire. On va dans ce cas calculer à rebours, en partant des livraisons connues, pour déterminer ce qui est superflu. Ce graphique s’adresse principalement au responsable de la ligne et au planificateur.

Visualisation de la disponibilité restante.

Points importants:

  • La quantité disponible affichée indique qu’on peut prendre au maximum cette quantité sur la journée, mais qu’il faut impérativement réactualiser le graphique avant de placer une nouvelle commande. Ainsi dans l’exemple ci-dessus, on pourrait ajouter une commande de 15 pièces au jour 21, mais c’est tout! Bien que le graphique indique la valeur de 19 pour les jours 22 à 29, on ne peut pas retirer ce nombre de pièces à chacun des jours.
  • Ces graphiques ne remplacent pas un système complet de gestion des ressources (ERP). Ainsi, ils ne tiennent par exemple pas compte de la quantité de matières premières et de composants disponibles.
  • La capacité restante est en fait une surproduction. Or dans l’esprit Lean, on cherche à éviter toute surproduction. Une approche est donc d’utiliser ce graphique pour réduire volontairement la vitesse prévue, réaffecter les ressources à d’autres tâches et ainsi ne produire que la quantité nécessaire.

Conclusion

On a pu visualiser les commandes futures et l’état de la ligne d’une manière très simple. Ces graphiques sont facilement réalisables au moyen d’un simple tableur, où il suffit alors de rentrer les valeurs clés. En un coup d’œil, il est facile de juger si les attentes sont réalistes et où en est la ligne. Idéalement ces graphiques sont mis à jour en direct, ou au moins à un intervalle suffisamment court pour pouvoir reconnaître un problème et y réagir.

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